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vendredi 14 mars 2014

Chrix Morix, Musicians Say the Craziest Things

Le fanzine Musicians Say the Strangest Things est une perle qui ne pourrait exister ailleurs que dans l’univers éclaté du Do It Yourself. Chrix Morix nous amène en promenade à l’intérieur même de la tête de nos musiciens favoris (Vic Chesnutt, SNFU, Fucked Up, Nashville Pussy) en nous présentant des extraits d’entrevues criants de réalisme qui n’auraient pu trouver leur place dans un magazine et qui, regroupés ici, accompagnés de dessins des musiciens de la main même de Morix, nous transforment, nous lecteurs, en visiteurs VIP dans le backstage de leurs bavardages habituels.

Chrix Morix, Musicians Say the Strangest Things, fanzine, 2013


(Texte: Catherine Cormier-Larose)

jeudi 13 mars 2014

Mivil Deschênes et Jean-Sébastien Larouche, Aiming for the Gut

Dans cette époque où tout est rapide et éphémère, où il y a un nombre maximum de caractères pour dire quelque chose et où les images sont prédominantes, Aiming For the gut, le projet dessin cracker jack et poésie tranchante de Mivil Deschênes et Jean-Sébastien Larouche, arrache comme une bombe. C’est franc. C’est dur. Ça fait mal de vérité. Comme les gens qui se sont mis à chercher les marques de Banksy dans leur ville, Aiming For the gut est partout, il pèse et tache et s’ancre et s’impose parce qu’il parle la langue de son époque dans le but avoué de la malmener, lui tenir tête, la contester.

Mivil Deschênes et Jean-Sébastien Larouche, Aiming for the gut, L'oie de Cravan, 2013
 

(Texte: Catherine Cormier-Larose)

mercredi 12 mars 2014

Daniel Leblanc-Poirier, Le naufrage des colibris


Il y a une fille au centre du Naufrage des colibris, une fille distante, inaccessible, perdue. Au lieu de s'en plaindre, Daniel Leblanc-Poirier comble le vide en mettant des images, toutes sortes d'images qu'il ramasse du quotidien roffe qui constitue son univers. Il les trouve chaque fois merveilleusement justes. Une bicyclette volée à la place d'un sentiment, l'alarme de feu dans les larmes, se faire habiller comme un hot-chicken. Elles s'installent au point de rupture de ces textes qui n'arrivent pas à dire. Parce qu'il n'y a rien à dire tant il y a à ressentir. Et c'est ce que ses images font quand elles comblent le vide : elle rendent la communication caduque. Qu'un livre puisse être aussi triste que vivant, c'est possible. Car le visible fracassé en miettes est plus riche que la réalité.

Daniel Leblanc-Poirier, Le naufrage des colibris, L'écrou, 2013

mardi 11 mars 2014

Sophie Yanow, La guerre des rues et des maisons

Parce qu'on l'habite, on oublie trop souvent que la ville n'a rien de naturel. C'est un espace de disciplinaire. C'est ce que la grève de 2012 a fait apparaître. Mais les rues peuvent aussi se transformer en espaces tactiques lorsque les manifestants en reprennent possession. La guerre des rues et des maisons propose à cet effet une méditation très juste sur les effets qu'a le pouvoir sur l'intimité, la peur de manifester, cette sourde culpabilité qui nous rappelle aux illégalités qui nous constituent. Le trait d’esquisse de Sophie Yanow, sa manière de cadrer, sa manière d'intégrer dans le dessin le flot de sa pensée, tout ça réussit à poser si bien la question de la ville et du pouvoir qu'on s'étonne qu'il n'y ait pas plus de collaborations entre urbanistes et bédéistes.

Sophie Yanow, La guerre des rues et des maisons, La mauvaise tête, 2013

lundi 10 mars 2014

Le Collectif de Débrayage, On s'en câlisse

La grève étudiante de 2012 a suscité tant d'espoirs chez les intellectuels et les artistes qu'on peut se demander si à la fin ils ne l'ont pas étouffée, s'ils n'ont pas oublié qu'il s'agissait avant tout d'une grève destinée à créer un rapport de force avec le Gouvernement. On s'en câlisse existe pour cette raison, racontant dans un essai merveilleusement bien écrit ce qui fut perdu, le maintien du gel des frais de scolarité, comme ce qui fut gagné : faire éclater en plein jour aux yeux du grand public la brutalité du gouvernement libéral. Mais Le Collectif de Débrayage fait aussi beaucoup plus, partant de la grève pour jeter les bases d'une contre-histoire politique du Québec qui ne passerait plus obligatoirement par la Grande Noirceur et la Révolution tranquille.

Le Collectif de Débrayage, On s'en câlisse, Entremonde/Sabotart, 2013
 

dimanche 9 mars 2014

Pierre Antoine Lafon Simard & Marjolaine Beauchamp, Taram

Taram c’est le bruit du monde brisé. Le bar pogné entre les grands sapins et le chainsmokage comme activité principale. Du théâtre dur, vrai, bouleversant, qui nous présente l’envers des régions, et ces êtres résignés plus grands que nature qui y vivent. Comme l’écrit Marjolaine Beauchamp : « C’est juste ça ? C’est tout ce qui m’attend. Quand la lumière touchait le boutte de ma tête. Pas plus, pas moins. Juste ça. ». Taram comme la musique omniprésente, celle à laquelle on se confie parfois, ou qui nous tourne dans la tête. La vie, cette toune, contre laquelle nous ne gagnerons pas.

Pierre Antoine Lafon Simard & Marjolaine Beauchamp, Taram, Théâtre du Trillium, 2013

(Texte: Catherine Cormier-Larose)

samedi 8 mars 2014

Thierry Dimanche, Théologie hebdo



La mort de Dieu a laissé un vide, voilà qui n'est pas une nouvelle. Alors pourquoi, plus de 150 ans après cette annonce, revenir sur cette question sous la forme on ne peut plus séculière de l'hebdomadaire? Il s'agit pour Thierry Dimanche de prendre la mesure de toute la liberté qui fut gagnée, au plus loin de l'angoisse existentielle qui a dominé le vingtième siècle. Car l'absence de Dieu, c'est aussi le gain d'un espace de jeu qui rend la poésie possible comme langage désaxé de son usage dans tous les domaines imaginables, représentés ici par les cahiers d'un magazine, éditorial, musique, voyages, météo, etc., un magazine absurde par sa densité poétique, aux antipodes du bavardage.

Thierry Dimanche, Théologie hebdo, L'Hexagone, 2013

vendredi 7 mars 2014

Isabelle Montpetit et Mykalle Bielinski, Crémant impérial


Si le Québec prenait le temps de lâcher deux minutes cette histoire culturelle figée que les médias de masse ont créée et qui ne va plus nulle part, nous aurions dans les bars de toutes les régions des artistes qui feraient autre chose que chanter Paul Piché, Claude Dubois ou La Chicane. Nous pourrions entendre dans toutes les régions des poèmes de Patrice Desbiens, Marc-Antoine K. Phaneuf, Jean-Sébastien Larouche. Heureusement, grâce à Crémant Impérial, cet improbable Québec existe maintenant, et nous sommes dans la salle à chaque fois que nous le pouvons, criant avec elles les finales les plus punchées des poèmes de Jean-Philippe Tremblay ou de Jean-Paul Daoust.

Mykalle Bielinski & Isabelle Montpetit, Crémant Impérial

jeudi 6 mars 2014

Jason Camlot, What the World Said

L’œuvre de Jason Camlot se déroule dans un univers particulier, unique, parfois surréaliste, où musique, morts, enfants, étudiants, road trips et synagogues se rencontrent. Après la mort du père, quelle est la posture du deuil? Comment parle-t-on à la mort devenue personnage, quand cessera enfin le bavardage ambiant qui nous assourdi? What the World Said est un croisement. Une fin du monde annoncée et pourtant rattrapée par chaque poème, nous permettant de reprendre notre souffle perdu et de nous tenir debout. Enfin. Peut-être pas très fort, mais vivant.
 Jason Camlot, What the World Said, Mansfield Press, 2013


(Texte: Catherine Cormier-Larose)

mercredi 5 mars 2014

Camille Cléant, « Cher Univers »


Les textes qui composent « Cher Univers » ont d’abord été embossés sur des cartes d'hôpital, une nuit à l'urgence de l’Hôpital Saint-Luc. La facture du fanzine garde la trace de cette entreprise aux allures de guerilla administrative, chaque carte ayant été reproduite et juxtaposée à des dessins. Mais « Cher Univers » dépasse le projet formel. Chaque texte suit une pensée qui flâne, parfois grave, parfois juste niaiseuse. Au final, chaque lettre apparaît comme une marque inquiète mais joyeuse embossant une présence blafarde au milieu du vide silencieux du cosmos qui réapparaît chaque nuit dans le ciel.

Camille Cléant, "Cher univers", Galerie MousePrint, 2013

mardi 4 mars 2014

Ralph Elawani, redécouverte d'Emmanuel Cocke



Il y a aujourd'hui tant de fans de Josée Yvon, Denis Vanier, Louis Geoffroy, Patrick Straram, et pourtant aucune réédition de leurs livres, devenus introuvables et hors de prix pour la plupart. C'est en gardant à l'esprit cet état de fait qu'on se rend compte à quel point Ralph Elawani et la famille d’Emmanuel Cocke ont réussi une chose impossible : convaincre trois éditeurs de faire paraître ou reparaître simultanément cinq livres et une biographie. L'écriture de Cocke, fougueuse et joyeuse, apparaît comme ce coin à peine soulevé de la contre-culture québécoise des années 70, et nous fait nous rendre compte à quel point nous avons besoin aujourd'hui d'en retrouver la mémoire.
 
Ralph Elawani pour la redécouverte d'Emmanuel Cocke, publication conjointe chez Coup de tête/Tête première/Poètes de brousse.

lundi 3 mars 2014

Laurence Gough, « Sac-Ado », dans Maison des jeunes


« Sac-Ado » est courte mais la nouvelle parvient rapidement à son objectif : installer le lecteur dans ce non-lieu coupable des adultes qui se savent dans la trahison de l'intensité adolescente. Bibifuck, la narratrice, s'écrit à elle-même et à sa meilleure amie dans ce lointain avenir  où elles seront devenues « grand-mères », supposant qu'absolument rien n'aura changé, que l'intensité de l'amitié et du rapport au monde aura été conservée. Le texte ne dit rien de l'inévitable perte, mais il nous laisse à l'extérieur de cette vitalité qui ne nous apparaît qu'en fragments bourrés de cet humour adolescent navrant et de références culturelles d'un 1998 de banlieue banale destinées à un désaveu futur.

Laurence Gough, « Sac-Ado », Maison des jeunes, Ta mère, 2013.

dimanche 2 mars 2014

Sébastien Dulude, "Léviathan"


Il entre en scène avec une glacière. En sort un gilet de laine congelé qu'il entreprendra ensuite de déplier malgré la fibre glacée pour lui redonner sa forme. S'acharnant sur lui comme il a tenté sans succès de réanimer son père des années auparavant. Puis ses mains rouges et meurtries tenteront de se frayer un chemin dans les manches jusqu'à ce qu'il réussisse à enfiler le gilet. Le poème qu'il lira ensuite parle du froid qui conserve les souvenirs comme il conserve la viande, du poids des morts qu'on porte avec nous tous les jours et de toutes ces vies inachevées, ces relations inaccomplies. Avec cette performance, Sébastien Dulude a passé un cap en poésie de performance. Il est a des kilomètres de tous les autres en matière de lecture publique.

samedi 1 mars 2014

Le gala de l'Académie de la vie littéraire 2014


Nous nous appelions l'Académie de la vie littéraire au tournant du vingt-et-unième siècle. Mais comme ça fait bizarre de se souhaiter Bonne année rendu à la mi-février, nous avons décidé de tourner la page et de nous appeler dorénavant l'Académie de la vie littéraire.
Car de la vie littéraire, il y en a encore. En performance, en poésie, en bédé, en récit, en arts graphiques. Nous avons encore une fois cherché toute l'année ces choses merveilleuses qui ne ressemblent à rien de conventionnel et nous en avons encore une fois trouvé. Et alors que des institutions comme le Grand Prix Québecor du Festival International de la Poésie avouent leur propre essoufflement et changent leurs règles parce qu'il y a selon leurs organisateurs trop de livres à lire, nous, nous hypothéquons nos temps libres pour essayer de faire le tour de tout ce qui existe sans nous restreindre et on fait encore notre gros possible pour damer le pion aux autres prix et récompenser des artistes dont ils n'ont parfois même jamais entendu parler. C'est ça la game, c'est ça notre thrill. Nous ne trouvons pas les meilleures oeuvres, il n'y a pas de "meilleure" oeuvre. On pourrait même voir dans chaque "meilleure" une insulte à toutes les autres. Nous cherchons plutôt ce qu'une oeuvre peut dire des potentialités esthétiques de notre époque. Notre époque est capable de grandes choses, mais on ne trouve ces choses que dans les petits détails. Cette année, nous récompensons 13 projets artistiques qui déplient chacun à leur manière un de ces petits détails. Les voici:

Mykalle Bielinski & Isabelle Montpetit, Crémant Impérial
Jason Camlot, What the World Said, Mansfield Press, 2013

Camille Cléant, "Cher univers", Galerie MousePrint, 2013
Le Collectif de Débrayage, On s'en câlisse, Entremonde/Sabotart, 2013
Mivil Deschênes et Jean-Sébastien Larouche, Aiming for the gut, L'oie de Cravan, 2013
Thierry Dimanche, Théologie hebdo, L'Hexagone, 2013
Sébastien Dulude, "Léviathan", performance, divers événements
Ralph Elawani pour la redécouverte d'Emmanuel Cocke, publication conjointe chez Coup de tête/Tête première/Poètes de brousse
Laurence Gough, "Sac-Ado", dans Maison des jeunes, Ta mère, 2013
Pierre Antoine Lafon Simard & Marjolaine Beauchamp, Taram, Théâtre du Trillium, 2013
Daniel Leblanc-Poirier, Le naufrage des colibris, L'écrou, 2013
Chrix Morix, Musicians Say the Strangest Things, fanzine, 2013
Sophie Yanow, La guerre des rues et des maisons, La mauvaise tête, 2013

Mais vous allez dire : et Mathieu Arsenault? A-t-il bien, oui ou non, créé cette Académie de la vie littéraire pour en faire partie, de son époque, et enfin gagner le prix qu'il mérite? Nous avons scotché l'enregistreur mp3 de Radio Spirale sous la table du Cheval blanc où se déroulait la rencontre qui déterminerait des prix de cette année. Voici un restranscription de la conversation :

- Et Arsenault? On fait quoi avec Arsenault?
- Hostie, ça fait six ans qu'il a pas publié de livre! Il fait-tu exprès?
- Il a eu des bons articles dans Liberté?
- Ouin, monsieur J'ai-connu-Vickie-Gendreau! C'est pas en se montrant avec un ancien membre du comité de l'Académie qu'il va marquer des points.
- Fuck ouais. Pis en plus de ça, ça aurait l'air que son nouveau livre, bin ça s'appelle La vie littéraire! Il le veut-tu son prix ou bien s'il le veut pas!
- ZÉRO SUBTIL. Y a du monde qui ont juste pas de classe. C'en est gênant.

On félicite sincèrement tous les gagnants de cette année. Il y en aura un par jour en vedette sur ce blog jusqu'au jour du gala, et nous annoncerons aussi juste avant les noms farfelus de prix que chacun recevra.

Gala de l'Académie de la vie littéraire
Le dimanche, 16 mars 2014, 20h
Au Club Lambi, 4465 Boulevard Saint-Laurent, métro Mont-Royal
Prix d'entrée 5$
direction musicale: Propofol
DJ: Annie Q