J'ai déjà dit des choses dures à l'égard des positions que prend parfois Mathieu Bock-Côté dans les médias de masse. Mais parce que je critiquais ce qui, à mon sens, m'apparaissait comme une compromission de la figure de l'intellectuel à laquelle il tient, je me dois aussi pour cette raison souligner lorsqu'il prend la parole en tant qu'intellectuel pour défendre les humanités et dénoncer l'état policier qui rend impossible la liberté de les enseigner.
Nous avons sans doute peu de choses à nous dire, peu de points de discussion sur lesquels nous pourrions nous entendre, je ne suis pas non plus complètement d'accord avec plusieurs des positions de Bock-Côté dans ce texte, mais sur ce point, je ne peux que joindre ma voix à la sienne.
Attention, voici un lien que vous ne verrez probablement plus jamais sur ce blog: une chronique de Mathieu Bock-Côté. C'est dire si depuis quelques jours, tout est en train de basculer. On sait plus où y a la tête et où y a les pieds.
j'avais spotté aussi cette chronique surprenante. By the way, sur le thème "ça commence à chier grave", Marc Laurendeau, aussi un anodin représentant des médias de masses, racontait sur SRC que la psychose d'octobre 70 a trouvé sa naissance dans l'interdiction des manifs par Drapeau en 69. Bref, l'histoire semble vraiment vouloir se répéter. Harper doit attendre impatiemment la lettre de Charest réclamant l'envoi de l'armée pour réprimer cette insurrection appréhendée ou plus concrètement pour sauver les festival de jazz et juste pour rire. Que des gars comme Bock-Côté et Laurendeau perçoivent un malaise indique qu'on est pas tout à fait parano. Hang on.
RépondreSupprimerBien entendu! On a usé de la loi des mesures de guerre, sous prétexte d'une insurrection appréhendée, pour arrêter le plus de souverainistes possible, et pas que des petits syndicalistes ou des quidams qui s'étaient laissés emporter à crier «FLQ» en choeur au centre Paul-Sauvé; des personnages respectables et connus, des médecins, des artistes. Il fallait s'attaquer au mouvement, à la gauche en général, chercher à criminaliser l'option dans l'imaginaire. Il est tout à fait plausible qu'on tentera la même chose aujourd'hui. En fait, c'est ce qui se produit, et nous en parlerons encore très, très longtemps, nous le comprendrons peut-être que lorsque nous serons poivre et sel. Des centaines de milliers de personnes dans la rue, durant des mois, c'est important. Très important. Beaucoup de jeunes s'éveillent soudainement à la politique, goûtent au poivre, se mettent à lire des textes «compromettant», apprennent qui sont les Desmarais, etc. Il n'est plus question que de frais de scolarité, tout le monde le sait, et le pouvoir balance des lois démesurément violentes parce que ça sent le roussi dans ses culottes. Jusqu'ici, le conflit n'oppose pas le Québec au Canada, mais ça va y arriver, j'en suis certain, voyez comment les enjeux ont bougé depuis février. Il y a une couple de personnes qui commencent à croire à la possibilité réelle d'un Printemps québécois, et s'il fallait que des souverainistes reprennent le pouvoir, le Parti libéral pourri jusqu'au trognon s'effacerait pour une décennie au moins (comme cela s'est produit au fédéral), et il n'y aurait plus au Québec qu'un parti de droite dont on ne sait où il couche constitutionnellement mais semble en difficulté érectile, et quelques partis souverainistes, le plus puissant oscillant autour du centre selon la température, d'autres nettement à gauche. Et une fois Charest tombé, vers qui se tourneront les Québécois pour étirer le printemps? Le fou furieux à Harper. C'est clair qu'ils ont intérêt à étouffer ce Printemps rapidement. S'il faut encore recourir aux bons services de l'armée, ils l'inviteront. Il ne serait pas étonnant qu'ils provoquent et entretiennent volontairement les débordements pour justifier son intervention.
RépondreSupprimerEt Resistor, sauver les festivals, sauver quelques milliers de dollars touristiques aux commerçants du centre-ville seront certes de bonnes raisons à évoquer pour réprimer cet éveil inattendu de la gauche. Mais en fait, le tourisme vaut très peu dans la balance. L'enjeu ici est énorme, il est inquiétant, nous ne le saisissons pas tout à fait: le Nord, ses ressources, le pouvoir et la richesse qu'elles entraînent. La Révolution tranquille, c'est en partie une première réussite par le Québec de s'avancer dans le Nord, de le toucher. S'il fallait que l'État québécois sauce 21e siècle s'enrichisse dans la pleine mesure du potentiel de ces ressources, il y aurait un réel danger. Pourquoi pensez-vous que Charest a privatisé la section Gaz et pétrole d'Hydro-Québec? Enfin... Tout cela est très triste. Le néo-colonialisme relancé avec le Plan Nord n'a rien de réjouissant, qu'il soit fédéraliste, souverainiste, capitaliste ou socialiste. Ce sera inévitablement une catastrophe écologique et culturelle, pour les Premières Nation en particulier. Et souvenons-nous que la nationalisation d'Hydro-Québec a quand même été financée par un prêt new-yorkais en échange d'une promesse d'alimentation électrique pas chère de la Nouvelle-Angleterre. Baisés, nous le sommes. Faut résister, avec détermination, sans espoir.
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Paranoïaque? Tout à fait. Avec l'histoire qu'on a, il est difficile de ne pas l'être. Et quand un paranoïaque a raison ne serait-ce qu'un fois sur dix, il est plus lucide que tout optimiste: la beauté n'a jamais besoin de se cacher.
RBock