Le gouvernement libéral a entamé hier une expérience politique dont personne ne peut encore mesurer les conséquences. Il teste, pour l'avenir du Québec mais aussi pour l'ensemble du Canada, un totalitarisme à la canadienne. Cela est clair: le gouvernement conservateur qui ignore le Québec, regardera ailleurs, se gardera d'intervenir politiquement en invoquant sarcastiquement l'exception culturelle, mais prendra bien note de ce qui est en train de se passer, pour voir quelle est la limite de la population en matière de totalitarisme.
Il ne faudra pas compter sur la scène fédérale, il ne faudra pas compter sur la cour suprême, il ne faudra pas non plus compter sur la scène internationale contre laquelle fera barrage le Canada.
Nous avons été abandonnés de toute part.
Il n'est plus désormais impensable que la liberté d'expression soit complètement abolie. L'escouade politique qui sera mise sur pied pour traquer les organisateurs de manifestations en ligne pourrait avant longtemps élargir son mandat et considérer toute critique à l'endroit du gouvernement comme une incitation à manifester, à troubler la paix sociale et, possiblement, à inciter à craindre un acte terroriste. Ce pas a déjà été franchi lorsque les quatre personnes accusées d'avoir déclenché des fumigènes dans le métro ont également été accusées d'incitation à craindre un attentat terroriste.
Il n'est plus désormais impensable que les élections soient suspendues. Invoquant un climat social instable, le Parti libéral pourrait reconduire indéfiniment sa loi spéciale et ne promettre des élections qu'à la condition que soit revenue la paix sociale selon les conditions qu'il aura lui-même fixées.
Il n'est désormais plus impensable que les partis d'opposition soient neutralisés ou interdits. Si le port du carré rouge devient aux yeux de la loi spéciale une incitation au désordre social, le Parti québécois et Option nationale pourraient se voir interdire l'accès à l'Assemblée nationale, ou encore être tenus responsables de la reconduction ad infinitum de la loi spéciale, et faire en sorte que des élections ne pourront être tenues. Québec solidaire pourrait tout à fait être assimilé à un groupe terroriste, car la rhétorique du Parti libéral ne fait aucune distinction entre désobéissance civile et acte criminel organisé. Il pourrait en outre se voir retirer son statut de parti officiel. La structure de la CLASSE, semblable à celle de Québec solidaire, se voit constamment dénier son statut d'organisation par le discours du gouvernement libéral depuis le début de la crise. Si les choses en arrivaient là, le seul parti d'opposition légitime serait la CAQ, petit parti qui n'aurait aucune chance de prendre le pouvoir, mais demeurerait néanmoins la caution de façade au maintien d'un semblant de démocratie.
J'espère de tout coeur que le peuple québécois saura mettre fin rapidement et avec l'élégance dont il est capable à cette expérience politique terrifiante. J'avais depuis des années perdu confiance en lui, les derniers mois m'ont redonné un peu d'espoir. Je ne voudrais pas d'une autre génération perdue. Il en va de l'avenir du Québec et, paradoxalement, de l'avenir du Canada.
Bravo Mathieu. C'est noir comme le carré noir que nous risquons de porter bientôt mais je crois aussi "que les Québécois sauront trouver une solution élégante". SOLIDARITÉ!
RépondreSupprimerLe Québec, comme toute colonie, a toujours été un laboratoire pour les expérimentations sociales. Souvenez-vous la Crise d'Octobre 70, durant laquelle les Américains on a pris des notes pour coup d'État chilien de 73.
RépondreSupprimerJ'ai pensé à la même chose que toi dernièrement, en me disant que le fédéral, silencieusement, scrute certainement ce qui se produit ici avec grand intérêt (et une petite inquiétude). À preuve notamment les enquêteurs du SCRS venus s'entretenir avec la SQ lors du grand théâtre de Victoriaville. Ils savent bien, ces messieurs du Canada, qu'une fois que les Québécois auront bouté Jean Charest, ils se tourneront vers le fou furieux qui dirige le Canada. Ces messieurs s'y préparent. S'il y a effectivement un printemps québécois en cours, le Canada aura tout intérêt à le réprimer, de toutes les manières possibles. Les enjeux économiques néo-coloniaux du Nord sont beaucoup trop importants pour qu'on laisse les Québécois se lever et parvenir à s'y opposer.
Et non, comme toute colonie, le Québec ne pourra compter sur aucun soutien international. Oui, nous sommes coincés. Il y a toute raison d'être inquiet. Si cette loi est effectivement appliquée, il y aura probablement des arrestations politiques dans les prochaines semaines.
Bock
*ont pris des notes pour le coup d'État...
RépondreSupprimerscusez, je me suis pas relu dans l'emportement
Et notez que celui qui a signé les commentaires précédents n'est pas Bock-Côté, mais bien Raymond Bock!
RépondreSupprimerDoctorak trouve très très drôle le dernier commentaire.
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